En début d’année, l’île de Mayotte était frappée par le cyclone Chido. Un cyclone dévastateur. Et symbolique des spécificités climatiques auxquelles doivent faire face les collectivités d’outre-mer. Au vu des enjeux associés en termes de rénovation énergétique, ACTEE s’est enrichi d’un poste de chef de projet Animation Territoriale Antilles & Guyane, afin d’intensifier son soutien aux collectivités des DROM. Nous l’avons interrogé.
Joachim Gaignard : Je suis arrivé en novembre 2024. Ce qui m’a frappé, c’est la vitesse à laquelle j’ai pu nouer des contacts au sein des collectivités du territoire. C’est un sacré plus en termes d’échanges, et, de là, en termes d’accompagnement des projets de rénovation énergétique.
Auparavant référent ACTEE pour l’Ile-de-France et les Outre-mer, les réalités ultra-marines ne m’étaient pas étrangères. Mais être présent sur le terrain permet de prendre pleinement conscience du fait que, quand un appel à projet arrive de Paris – qu’il faut jongler avec visios et décalage horaire pour s’informer, voire se former… il est difficile pour les collectivités de se lancer. D’autant que toutes ne disposent pas des compétences sur les thématiques transition énergétique.
Etre présent permet donc de les informer, mais de proposer aussi, si besoin, un suivi personnalisé.
Chaque territoire a ses spécificités propres, mais il y a une constante : les réalités climatiques y sont très différentes de celles de l’Hexagone. Hors Saint-Pierre-et-Miquelon, ce sont des territoires tropicaux exposés à des risques majeurs – cyclones, pluies torrentielles, volcanisme, sismicité… qui ont un impact majeur pour penser efficacité et rénovation énergétique.
Dans l’Hexagone, on réfléchit souvent isolation contre le froid et production de chaleur, mais en outre-mer, il s’agit à l’inverse d’améliorer le confort tout en limitant le recours à la climatisation. Cela impose de penser îlots de chaleur, constructions bioclimatiques, orientation du bâti favorisant la ventilation naturelle, isolation des toitures pour faire face aux pluies torrentielles ou protection solaire type ombrières. C’est crucial, d’autant que le patrimoine public des DROM est dans l’ensemble dégradé.
Nous le faisions déjà, autant que faire se peut. Exemple : dans les éditions 1 à 4 de Chêne, via des bonifications financières pour les DROM sur certains lots (1 et 3), et des critères spécifiques en matière de maîtrise d’œuvre (lot 4). Et aujourd’hui, il existe une enveloppe de 3 millions d’euros bloquée pour les DROM dans le cadre du fonds Chêne 5 et suivants.
Plus globalement, nous souhaitons stimuler les candidatures ultra-marines, notamment celles des collectivités des Antilles et de Guyane, trop peu représentées lors des précédentes éditions.
Et tout faire pour que leurs projets lauréats débouchent sur du concret. Pour x raisons (recrutement en cours d’économes de flux, disponibilité des matériaux, etc), ce n’est pas toujours évident dans les DROM. D’où l’importance des dispositifs locaux type comités de financeurs, comme il en existe à la Réunion, et depuis peu en Guadeloupe. L’idée est de s’assurer que lorsque qu’ACTEE finance, par exemple, l’audit énergétique d’une école, un autre acteur se positionne pour l’accompagnement financier des travaux.
Il y a selon moi un enjeu global : faire comprendre aux collectivités, aux moyens financiers limités, que, face au changement climatique, le coût de l’inaction est plus élevé que celui de l’action. Et que l’efficacité énergétique s’appréhende de façon globale – en pensant donc bioclimatisme, végétalisation du bâti comme des cours d’école, sobriété…
ACTEE d’ailleurs a rédigé, avec différents partenaires, un cahier des charges d’audits énergétiques adapté aux territoires d’outre-Mer.
Dans le détail, hors fonds Chêne, la demande est forte concernant la rénovation de l’éclairage public – accompagné via Lum’ACTEE. Autre priorité selon moi : les scolaires – qu’il s’agisse de la rénovation énergétique du bâti scolaire, comme de la sensibilisation au changement climatique des plus jeunes, via notre programme Ecopousse.
Interview réalisée par Elma Haro